Les défaillances en France en forte hausse

Pas moins de 30 457 liquidations judiciaires ont été ouvertes (en hausse de 47,9 %) en 2022 et 8 879 (+44,8 %) au cours du quatrième trimestre.

Depuis 2020, ces liquidations concentrent les trois quarts des jugements prononcés, contre les deux tiers avant Covid.

Bruno De Moura Fernandes, notre responsable de la recherche macroéconomique, analyse les défaillances des entreprises pour l’année écoulée, et délivre les perspectives attendues pour 2023.

 

Quelles sont les évolutions en termes de restructuration d'entreprises ces dernières années ?

En matière de défaillances, nous avons remarqué une remontée progressive de leur nombre, alors qu’en 2021 de façon contre intuitive, nous en avons enregistré moins. Cela s’explique notamment par les aides de l’État accordées aux entreprises. Qu’il s’agisse du fonds de solidarité, des PGE, ou du chômage partiel... Cette année-là, leur nombre a chuté. Nous nous attendons à un retour progressif à la normale. Avec 41 092 procédures ouvertes en 2022, les défaillances d’entreprises accusent une hausse exceptionnelle de près de 50 % par rapport à 2021. Le nombre global de procédures reste toutefois inférieur de 10 000 par rapport aux niveaux de 2019.

En 2023, celles-ci vont continuer à augmenter, probablement au-dessus des chiffres de 2019. En début d’année 2022, les entreprises avaient beaucoup de trésorerie. Mais pour 2023, nous sommes dans l’attente des remboursements de PGE.

Par ailleurs, le coût de l’énergie reste élevé, les coûts de financement aussi, notamment à cause des taux d’intérêt particulièrement élevés sur les nouveaux crédits. Enfin, à leur tour, les salaires augmentent de 3,8 % au troisième trimestre.

 

Les PGE à rembourser, mais aussi l’inflation, le coût de l’énergie et des matières premières peuvent-ils nuire à la pérennité des entreprises et si oui à quel point ?

Désormais, les aides sont bien plus ciblées que durant la pandémie. Par conséquent, les entreprises « zombies » ne tiendront pas. La pérennité des petites entreprises les plus fragiles est en cause. Nous constatons une hausse des défaillances principalement des TPE et PME. Si le retour aux normes d’avant Covid s’amorce depuis un peu plus d’un an maintenant, l’augmentation des défaillances s’accélère de manière alarmante pour les PME dont plus de 3 000 ont défailli en 2022 dont un tiers sur le seul quatrième trimestre.

Concrètement, ménages et entreprises ont bénéficié des aides liées à la crise énergétique. Au moment du Covid, elles s’élevaient à environ 10 % du PIB contre 4 % aujourd’hui Soulignons que l’essentiel des défaillances concerne les TPE. La part des entreprises qui font moins de 250 000 euros de chiffre d’affaires s’élevait à 86 % au mois de novembre 2022.Enfin, les grands groupes, qui font plus de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires, ne représentent que 0,3 % des défaillances.

 

Certains secteurs sont-ils plus touchés que d’autres, si oui lesquels et pourquoi ?

Effectivement, les défaillances progressent fortement dans le secteur de l’agroalimentaire, qui rassemble les agriculteurs, les boulangers, ou encore l’épicerie. Cela s’explique par la hausse des coûts des matières premières, notamment le prix des céréales. Et dans le secteur de l’industrie, elles ont rapidement augmenté de 68 %, soit 3 083 procédures ouvertes dont 1 314 en agroalimentaire, parmi lesquelles 874 boulangers-pâtissiers, soit 124,7 % de hausse. Les services aux particuliers ne sont pas épargnés: 4 349 établissements dans le domaine de la restauration ont défailli en 2022, c’est 112,7 % de plus qu’en 2021.

Sur le dernier trimestre, le rythme ne faiblit pas non plus à +108 %. Les salons de coiffure et de beauté eux aussi ont été sérieusement touchés.

Par ailleurs, les secteurs à forte consommation d’énergie comme les transports, la chimie, le plastique, le ciment et les métaux sont particulièrement vulnérables dans cet environnement de prix de l’énergie durablement élevés. Enfin, le secteur du retail est affecté du fait de l’inflation. Celle-ci diminuant le pouvoir d’achat des Français, nous craignons de voir un grand nombre d’entreprises défaillantes en 2023. Cela a déjà été le cas de Camaïeu ou encore Go Sport. Le secteur de la construction est également concerné par la hausse des taux d’intérêt des crédits immobiliers, liée au resserrement monétaire de la BCE. Cela est d’autant plus préoccupant que le secteur concentre historiquement entre 25 et 30 % de défaillances.

 

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