

Tadjikistan
Synthèse
principaux Indicateurs économiques
2020 | 2021 | 2022 (e) | 2023 (f) | |
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Croissance PIB (%) | 4,5 | 5,0 | 7,0 | 5,5 |
Inflation (moyenne annuelle, %) | 8,6 | 9,5 | 6,9 | 6,5 |
Solde public / PIB (%) | -4,3 | -0,7 | -2,4 | -2,7 |
Solde courant / PIB (%) | 4,3 | 8,4 | -1,4 | -2,4 |
Dette publique / PIB (%) | 50,4 | 44,4 | 39,5 | 40,6 |
(e) : Estimation (p) : Prévision
POINTS FORTS
- Abondance des ressources naturelles (potentiel hydroélectrique, coton, aluminium, or)
- Potentiel agricole et touristique inexploité
- Couloir de transit entre l’Ouzbékistan, le Kirghizstan, l’Afghanistan, le Pakistan et la Chine
- Population jeune (50% a moins de 25 ans)
- Soutien financier des bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux, dont la Chine
- Membre de l’Initiative Ceinture et Route (ICR) de la Chine
POINTS FAIBLES
- - Forte dépendance aux conjonctures russe, via les transferts des travailleurs expatriés (25% du PIB), et chinoise (7ème marché d’exportation, créancière et pourvoyeuse de 2/3 du total des IDE)
- - Forte dépendance aux matières premières (or, coton, aluminium) et faible diversification de l’économie
- - Contrôle étroit du marché des changes et des échanges commerciaux
- Système bancaire fragile et concentré, et crédit cher, peu développé, dirigé et dollarisé (50% du total)
- Géographie difficile (enclavée et à 90% montagneuse) et vulnérabilité élevée aux catastrophes naturelles
- Infrastructures inadéquates (énergie, eau, transport, santé)
- Pauvreté élevée (26% de la population en 2019), travailleurs peu éduqués et peu productifs
- Rôle limité du secteur privé, environnement des affaires difficile qui contraint les IDE (1,8% du PIB)
- Gouvernance défaillante (corruption, crime organisé, politisation du système judiciaire)
- Voisinage avec l’Afghanistan, risque de déstabilisation (tensions ethniques, terrorisme en hausse, potentiels flux de réfugiés)
Appréciation du risque
La baisse des envois de fonds de Russie déprime la croissance
La croissance devrait fortement ralentir en 2022 en lien avec la baisse des envois de fonds des expatriés travaillant en Russie, ainsi que le ralentissement de l’investissement et la dégradation des termes de l’échange. Les envois de fonds représentaient environ 30% du PIB en 2021, et 58% du total provenaient de Russie. La Banque mondiale prévoit une contraction de ces transferts d’environ 40% en 2022 en raison de la récession russe qui diminue l’emploi pour les migrants, réduisant fortement la consommation privée au Tadjikistan (80% du PIB). L’investissement public, à l’inverse, devrait soutenir la demande intérieure, même s’il ralentira, tandis qu’un climat des affaires peu attrayant limite l’investissement privé, malgré un nouveau code fiscal mis en œuvre au début de l’année. L’inflation augmentera, reflétant les prix élevés de l’énergie et autres matières premières importées (combustibles minéraux, céréales, bois, fer et acier), la hausse des salaires et pensions, ainsi que des tarifs de l’électricité. La politique monétaire tentera de contenir l’inflation et la volatilité du somoni. Néanmoins, une hausse du taux directeur trouve sa limite dans la demande de financement budgétaire de l’Etat : malgré la guerre en Ukraine, la Banque Centrale a laissé son taux directeur inchangé. Les réserves de change pourraient tomber en dessous de 2 milliards de dollars (moins de 6 mois d’importation), car elles serviraient à payer les interventions en devises pour soutenir le somoni. Cependant, les gains dans l’industrie et les mesures d’urgence mises en place par des organismes de développement (Nations Unies, BAD, BERD) pour soutenir la consommation, devraient permettre de maintenir une croissance faiblement positive en 2022. En effet, l’activité industrielle devrait augmenter d’environ 10% grâce à des efforts pour stimuler la production d’électricité, l’exploitation minière et l’industrie manufacturière. La contribution des exportations nettes à la croissance sera négative, puisque les ventes d’or se stabilisent et les prix du pétrole sont élevés.
Endettement élevé auprès de la Chine
En janvier 2022, un nouveau code fiscal a réduit les taux d’imposition et créée de nouvelles incitations fiscales, afin de soutenir l’entreprenariat et la croissance. De plus, le gouvernement poursuivra sa politique expansionniste par le biais de dépenses sociales élevées, bien qu’en diminution en pourcentage du PIB. Les dépenses augmenteront particulièrement dans les secteurs de la santé, de l’énergie et de l’agriculture. Elles pourraient être plus importantes en cas d’apurement des arriérés des entreprises d’Etat, d’un nouvel accès de faiblesse du somoni, ou d’une aide financière fournie aux migrants, sans emploi, de retour au Tadjikistan. En somme, le déficit budgétaire se creusera. Le gouvernement prévoit de couvrir tout déficit de financement d’infrastructure par des emprunts extérieurs à des conditions concessionnelles (453 millions de dollars prévus en 2022). Par conséquent, la dette extérieure (48% du PIB), entièrement publique, se creusera pour représenter environ 88% de la dette publique totale. Le fardeau du service de la dette, est déjà lourd et le risque de surendettement élevé, alors que les réserves internationales ne couvrent qu’un tiers de la dette totale. En cas de matérialisation de ce risque, l’attitude de l’Eximbank chinoise, principale créancière, serait déterminante. Cela sans compter le passage du compte courant en déficit, car le déficit commercial, traditionnellement massif, se creusera du fait du renchérissement des importations, alors que les envois de fonds diminueront. Toutefois, les importations liées au projet hydro-électrique Rogun seront limitées, en prévision de la reconnexion du Tadjikistan au réseau électrique d'Asie centrale en 2022.
Maintien de la dépendance à la Russie
Déjà influente au travers des remises de fonds d’expatriés, qui peuvent être stoppées à tout moment, la Russie tente de renforcer son influence au Tadjikistan. Le 28 juin 2022, Poutine a rendu visite au président Emomali Rahmon, notamment pour établir une position commune vis-à-vis de l’Afghanistan. Elle étend également sa présence culturelle, puisque cinq nouvelles écoles de langue russe, construites sur fonds russes, doivent ouvrir en septembre. De surcroit, la base militaire russe numéro 201 au Tadjikistan est la plus importante que la Russie possède en dehors de ses frontières. Des exercices militaires conjoints réguliers avec les forces tadjikes montrent que les forces russes interviendront en cas de problème, notamment sur la frontière avec l’Afghanistan. Cependant, les États-Unis tentent de se positionner comme une alternative viable en tant que garant de la sécurité. L’ambassade des Etats-Unis à Douchanbé supervisera bientôt les travaux du nouvel avant-poste frontalier avec l’Afghanistan. Les relations, autrefois tendues, avec l’Iran sont également en amélioration. Le 29 mai 2022, Rahmon a rendu visite à son homologue iranien, avec lequel une plus grande coopération en matière de sécurité est envisagée. 17 accords de coopération ont été signés et des contrats, d'une valeur totale d'un milliard de dollars, ont été signés entre des entreprises des deux pays.
Sur le plan domestique, la priorité pour le président est de voir sa famille conserver le pouvoir, par l'intermédiaire de son fils, Rustam Emomali. Ce dernier a été élu président de la chambre haute du Parlement en avril 2020, ce qui le place en première position pour succéder à son père, qui dirige le pays depuis le début des années 1990. Enfin, l’un des principaux risques concerne la région autonome ethniquement pamirie du Gorno-Badakhchan (GBAO) dans l'est du Tadjikistan, où ont eu lieu, en mai, des nouvelles manifestations réprimées dans le sang provoquées par le mécontentement croissant de la population à l’égard des représentants locaux du pouvoir central. La région est liée au trafic de drogue transfrontalier, et se situe entre l’Afghanistan et la région chinoise du Xinjiang.
Dernière mise à jour : Août 2022