La consommation privée et les fonds européens, moteurs d’une croissance solide en 2026
En 2025, la croissance marque un léger repli par rapport à 2024, mais demeure solide en comparaison régionale (0,9% dans la zone euro). Ce ralentissement s’explique par un effet de contrecoup observé au premier trimestre, consécutif à l’accélération marquée de fin 2024. Celle-ci avait été alimentée par une forte hausse du revenu disponible des ménages, stimulée par des mesures budgétaires expansionnistes, favorisant ainsi la consommation privée. En 2026, l’économie portugaise devrait continuer de surperformer. La baisse de l’impôt sur le revenu, la revalorisation des salaires (salaire minimum à 920€ après 870€ en 2025) et une inflation globalement stable favoriseront une consommation privée dynamique. Cependant, l’incertitude mondiale pourrait peser sur la consommation, comme en témoigne la hausse du taux d’épargne des ménages, qui a atteint un pic début 2025. L’investissement public devrait croître significativement, appuyé par les décaissements du Plan de relance et de résilience (RRP) financé par l’Union européenne, avec un pic de transferts prévu en 2026. Toutefois, des retards persistants dans la mise en œuvre de ces fonds européens pourraient limiter l’impact économique positif attendu. Au 3 septembre 2025, le Portugal avait perçu 12,7 milliards d’euros. Mais sur les 22,2 milliards d'euros à mettre en œuvre d'ici 2026, seuls 39 % de ce montant ont été versés aux bénéficiaires. Dans le même temps, l’investissement privé devrait progresser, soutenu par l’amélioration des conditions de financement - quatre baisses des taux directeurs de la BCE depuis janvier 2025 – et une nouvelle réduction de l’impôt sur les sociétés (IRC).
Le secteur des services (77% du PIB en 2024) devrait rester dynamique, notamment dans le tourisme et ses activités connexes (hôtellerie, restauration, commerce). Toutefois, son impact sur la croissance sera moins marqué que durant la phase de reprise post-pandémique. Le secteur de la construction, quant à lui, montre des signes de reprise, notamment le génie civil grâce aux fonds européens. L’immobilier résidentiel reste résilient grâce à l’assainissement de la santé des ménages (diminution du ratio de prêts non performants des ménages pour le logement à 1,2% au premier trimestre 2025). Cependant, le secteur restera confronté à des contraintes structurelles, notamment la hausse des coûts de production de logements neufs liée à une pénurie persistante de main d’œuvre, qui freinent les mises en chantier. Enfin, les risques liés à l’instauration par les Etats-Unis, en août 2025, d’un droit de douane de 15?% sur les importations en provenance de l’Union européenne sont particulièrement élevés pour certaines filières portugaises — notamment celles de l’essence, du caoutchouc et du vin — qui présentent une dépendance accrue au marché américain.
En 2026, l’inflation poursuivra son ralentissement, se rapprochant progressivement de l’objectif fixé par la BCE. Des pressions subsistent, alimentées par la dynamique des salaires et une demande intérieure robuste. Par ailleurs, la récente appréciation de l’euro ainsi que la baisse des prix énergétiques contribue à atténuer l’inflation importée.
Un retour du déficit public, mais une position extérieure solide et une dette publique maîtrisée
En 2026, le gouvernement de centre-droit poursuivra une politique budgétaire expansionniste, axée sur l’augmentation des dépenses dans les services publics et les retraites, la hausse des salaires et les réductions d’impôts. Malgré tout, cette orientation restera d’ampleur modérée, la préservation de l’équilibre budgétaire demeurant une priorité centrale dans l’agenda politique. Après être redevenu légèrement déficitaire en 2025, le solde budgétaire devrait se creuser davantage en 2026. En juillet 2025, le Conseil des ministres a approuvé une nouvelle baisse de l’IRC de 20% à 19% en 2026 (de 16% à 15% pour les PME sur les premiers 50 000 euros de revenus imposables). Par ailleurs, le financement du RRP reposera davantage sur des emprunts que sur des subventions en 2026, entrainant cette fois un impact négatif sur les comptes publics. Le gouvernement prévoit également une augmentation significative des dépenses de défense, rendue possible par l’activation d’une clause dérogatoire nationale, qui autorise à augmenter ces dépenses de 1,5% du PIB par an sur les quatre prochaines années. Enfin, la forte croissance du PIB, associée à une orientation budgétaire globalement prudente, devrait permettre la poursuite de la trajectoire résolument descendante de la dette publique en 2026. Toutefois, la réapparition d’un déficit budgétaire ralentira le rythme de cette décrue.
L’amélioration de la position extérieure du pays devrait se poursuivre en 2026, sous l’effet du maintien d’excédents élevés du compte courant et de capital. Le déficit structurel de la balance des biens – lié à l’augmentation des importations de machines et de biens d’équipements dans un contexte d’investissement soutenu - sera largement compensé par l’excédent des services, alimenté par les revenus du tourisme. Les transferts de la diaspora portugaise contrebalanceront les rapatriements de dividendes opérés par les investisseurs étrangers, tandis que l’intensification des transferts européens de capital renforceront l’excédent du compte de capital.
Une fragmentation parlementaire qui laisse présager une instabilité politique
Les élections législatives anticipées de mai 2025, provoquées par la démission du Premier ministre Luís Montenegro à la suite d’allégations de conflit d’intérêts, ont une nouvelle fois abouti à la formation d’un Parlement fragmenté — un an après la chute du gouvernement socialiste. Montenegro a finalement été reconduit à la tête de l’exécutif et dirige un gouvernement de centre-droit minoritaire (l’Alliance démocratique, coalition réunissant le PSD et le CDS-PP) détenant désormais 91 sièges sur 230 au Parlement. Pour la première fois, le parti d’extrême droite Chega s’impose comme principale force d’opposition, avec 60 sièges, devant le Parti socialiste (PS, 58 sièges). S’il avait réussi à faire passer le budget 2025 grâce à l’abstention du PS, le gouvernement semble avoir cette fois priorisé les négociations avec Chega pour faire adopter des lois, notamment le budget 2026. Pour espérer obtenir son soutien, il s’est montré disposer à intégrer certaines revendications de Chega, dont le renforcement de la baisse de l’IRS pour les tranches intermédiaires de revenus (de la deuxième à la cinquième). En juillet 2025, il a également adopté un paquet législatif anti-immigration, visant la limitation des visas, le durcissement du regroupement familial et la suppression des procédures de régularisation simplifiées. Le vote du budget de l’Etat n’est pas garanti, mais un accord semble primordial. En effet, l’élection présidentielle de janvier 2026, en vertu de la Constitution, empêche la dissolution du parlement (et la chute du gouvernement) au moins jusqu’en avril 2026. Quelle que soit l’issue des négociations en cours, la fragmentation actuelle du Parlement laisse présager une période d’incertitude et une possible instabilité politique au cours des prochaines années.