Une croissance encore vive, soutenue par l’investissement
En 2025, l’économie conservera une croissance vive. Le secteur industriel (20 % du PIB en 2024) bénéficie du renforcement des capacités agro-industrielles, en particulier dans la filière textile, permis par l’expansion de la zone industrielle de Glo-Djigbé (GDIZ). L’investissement public, dans le cadre du Plan d’action gouvernemental 2021-26 (PAG II), soutient la construction. Parmi les projets figurent la modernisation du port de Cotonou et le développement des infrastructures (transports, électricité, assainissement, technologies de l’information). Ces investissements profitent aussi au secteur des services (50 % du PIB), en particulier au tourisme, aux télécommunications et au commerce. Une bonne performance agricole (30% du PIB) et halieutique est attendue, favorisée par des subventions sur les engrais ainsi que des investissements privés dans les filières du coton, de l’anacarde, de la pêche et de l’aquaculture. Le commerce transfrontalier reprend progressivement avec le Niger depuis août 2024, y compris le commerce de transit, notamment pétrolier. Néanmoins, l’insécurité persistante dans le nord du pays, où se concentrent les principales zones de production cotonnière, ainsi que des retards dans la réouverture complète de la frontière avec le Niger voisin, pourraient freiner la croissance.
La consommation publique, déjà soutenue par les impératifs sécuritaires et sociaux, trouvera un surplus de dynamisme à l’approche des élections. La consommation privée continuera de croître, bénéficiant d’une inflation maîtrisée. En effet, en 2025, l’inflation restera dans la fourchette cible de 1% à 3% définie par la Banque des Etats de l’Afrique de l’Ouest. Le pays bénéficiera de la baisse des prix mondiaux des céréales. Déjà, le recul des cours internationaux du pétrole entraine une diminution du coût du carburant illicite en provenance du Nigeria. Par ailleurs, l’appréciation du FCFA face à l’USD, due au renforcement de l’euro dans un contexte d’incertitude sur les marchés financiers et de perte de confiance dans la politique économique américaine, contribuera à réduire l’inflation importée.
Consolidation des comptes publics et diminution du déficit courant
La mise en œuvre du PAG II s’appuie sur deux programmes conjoints du FMI arrivant à échéance en janvier 2026 : la Facilité élargie de crédit/Mécanisme élargi de crédit (73 millions USD restants à débourser, dont 35 millions en juin 2025), et la Facilité pour la résilience et la durabilité (161 millions USD restants, dont 80 millions en juin). Conformément aux engagements pris avec le Fonds, le gouvernement poursuit ses efforts d’assainissement budgétaire, permettant une nouvelle réduction du déficit public en 2025, rejoignant le plafond de 3% du PIB fixé par l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Le budget 2025 s’établit à 3 551 milliards FCFA (5,3 milliards €) en hausse de 11% par rapport à 2024. Près de 42 % des dépenses sont orientées vers des secteurs à forte sensibilité sociale, tels que les infrastructures urbaines et rurales, l’éducation, la santé et autres programmes sociaux. Les sommes allouées à la défense connaissent une hausse notable (118 milliards FCFA, soit +18 %) pour répondre à l’aggravation des attaques terroristes dans le nord. Dans le même temps, le gouvernement doit accroître les recettes sans obérer le développement. Ainsi, il maintient son appui au secteur privé par des exonérations de TVA et de droits de douane sur les équipements et véhicules neufs importés par les PME. Parallèlement, il poursuit sa stratégie de recettes à moyen terme (SRMT) 2024-2028, visant à générer 0,5 % du PIB en recettes supplémentaires chaque année, par l’élargissement de l’assiette (via la lutte contre l’informalité et la contrebande), l’amélioration de la conformité de la part des contribuables, et la numérisation. La dette publique (pour 73 % extérieure) rapportée au PIB poursuivra sa trajectoire descendante en 2025, en deçà du seuil de 70 % du PIB fixé par l’UEMOA, grâce à la réduction du déficit et à la vigueur de la croissance.
Le déficit du compte courant devrait à nouveau se réduire en 2025 avec l’amélioration de la balance commerciale. Bien que celle-ci demeure déficitaire en raison de la forte demande intérieure et de la faible diversification de l’économie, la baisse des prix mondiaux du pétrole et des céréales contribue à alléger la facture d’importation. En parallèle, les exportations sont stimulées par l’expansion de la zone industrielle de Glo-Djigbé et du port de Cotonou, qui coïncide avec la hausse de la production de coton et de textile, ainsi que la reprise des recettes de transbordement, à mesure que les relations avec le Niger se normalisent. Le déficit des services persistera en raison des besoins en formation, conseil ou ingénierie — liés à la mise en œuvre des projets d’infrastructure. L’excédent des revenus secondaires, généré par les envois de fonds des expatriés et les aides-projets, compense le déficit des revenus primaires, engendré par le rapatriement des bénéfices des entreprises étrangères et le paiement des intérêts sur la dette. Le déficit courant sera financé par des IDE, des prêts multilatéraux — notamment de la Banque mondiale et du FMI — ainsi que par des émissions d’euro-obligations (27 % de la dette extérieure en 2024), dont celle de janvier 2025 (500 millions USD avec une échéance de 16 ans et un coupon en euros de 6,48 %).
Terrorisme islamiste croissant au nord
Réélu en 2021, le président Patrice Talon exerce un contrôle étroit sur les institutions. Lors des élections législatives de janvier 2023, les deux partis pro-gouvernementaux — l’Union progressiste (UPR) et le Bloc républicain (BR) — ont remporté une large majorité avec 81 sièges sur 109 à l’Assemblée nationale. Elles se sont déroulées dans des conditions affaiblissant l’opposition (arrestations ciblées et violente répression). Pourtant, le président a déclaré qu’il ne briguerait pas un troisième mandat en 2026, conformément à la Constitution.
Depuis janvier 2025, le nord du pays est confronté à une recrudescence des attaques terroristes meurtrières de la part des groupes djihadistes basés au Burkina Faso et au Niger voisins, favorisée par la coopération défaillante entre les trois pays. Le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger —regroupés au sein de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) — de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, en janvier 2025, fragilise l’unité et la coopération régionale. Les relations du Bénin avec les pays de l’AES resteront sujettes à des tensions, en raison de ses liens étroits avec la France. A cet égard, la normalisation complète des relations économiques et diplomatiques avec le Niger tarde à se concrétiser, malgré la reprise des exportations de pétrole nigérien via l’oléoduc reliant Agadem au port béninois de Sèmè-Kpodji. Alors que le Bénin a rouvert sa frontière en mai 2024, après la levée des sanctions économiques de la CEDEAO fin février 2024, le Niger maintient la sienne fermée, le justifiant par la présence supposée de bases militaires françaises sur le sol béninois. Les récentes attaques terroristes assombrissent les perspectives de détente à court terme.
A l’inverse, le pays entretient d’étroites relations avec l’Union européenne, basées sur des accords de coopération économique et militaire, et des aides substantielles, qui pourraient s’accroître avec la disparition de l’aide américaine. Les relations avec la Chine se caractérisent par des investissements chinois significatifs dans les transports et les projets agro-industriels, et une coopération continue autour de l’oléoduc Bénin-Niger, par lequel le pétrole est exporté vers la Chine.